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5 février 2009
par Son Excellence Michaëlle Jean
J’ai toujours pensé que ce temps de réflexion, chaque mois de février, sur la lutte des Noirs pour leur émancipation n’avait de valeur que si on l’inscrivait dans la marche même de l’histoire de l’humanité, en lui octroyant pleinement sa dimension universelle.
Il en va de même, dans mon esprit, de la lutte des femmes, des peuples autochtones, des gais et lesbiennes pour la reconnaissance et le plein respect de leurs droits. À titre d’exemple, car la liste des combats menés au fil de l’histoire contre toutes les formes de discrimination qui empoisonnent notre vie en société est une liste très longue. La voix des opprimés et des exclus est nécessaire car elle bouscule nos consciences, nous force à un état des lieux de la pensée, nous permet de mesurer le chemin parcouru et l’étendue de ce qu’il reste à accomplir pour un monde plus juste et plus humain.
L’édition 2009 du Mois de l’histoire des Noirs est marquée de façon incontournable par l’élection d’un premier président des États-Unis d’Amérique de descendance africaine. Le 20 janvier dernier, à l’occasion de la prestation de serment du président Barack Hussein Obama, j’ai déclaré qu’une page inédite de l’histoire des civilisations s’écrivait sous nos yeux. Comment ne pas se réjouir de cette avancée monumentale des esprits dans ce même pays qui a bâti sa prospérité sur la pratique infâme de l’esclavage et érigé des siècles durant, voire jusqu’à tout récemment, la ségrégation et le racisme en système. La résonnance planétaire suscitée par cet événement dit toute son universalité. Comme le rêve exprimé avec force et conviction par le révérend Martin Luther King en 1963. Comme la libération puis l’élection de Nelson Mandela qui sonnera le glas du régime d’apartheid en Afrique du Sud. Le monde entier a su s’approprier ces moments et a su reconnaître là des avancées déterminantes dans la longue marche pour l’égalité. Les mots d’espoir de Barack Obama trouvent leur puissance dans cette capacité rassembleuse qui transcende toutes les barrières, qu’elles soient raciales ou autres. Son «Yes We Can» a le mérite d’ouvrir l’espace de tous les possibles et d’inviter les individus comme les peuples à unir leurs efforts, à croire en leur pouvoir d’agir et de redéfinir le monde.
Le 20 janvier nous avons tenu à Rideau Hall un Dialogue jeunesse, auquel plus d’une centaine de jeunes de tous les horizons de notre riche diversité canadienne ont participé. Notre discussion après avoir suivi ensemble la cérémonie en direct de prestation de serment du 44e président américain a été des plus révélatrices. L’énergie était palpable, l’appel à l’engagement citoyen, à la responsabilité d’agir, à l’importance de secouer l’apathie et l’indifférence l’ont emporté et c’était formidable !