Son Excellence la très honorable Michaëlle Jean - Discours à l’occasion de la remise du Prix du Gouverneur général pour l’entraide

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Montréal, le lundi 13 février 2006

Ce que vous faites n’a pas de prix. Allumer une étincelle de joie dans les yeux d’un enfant malade; donner des ailes à un jeune handicapé; réconforter un adolescent en crise; distribuer des paniers de nourriture; prêter main-forte à la famille immigrante qui vient d’emménager dans l’appartement du haut; rendre visite à une personne âgée et l’écouter se raconter.

Voilà autant de gestes du quotidien qui ont le pouvoir de changer le cours d’une vie.

Peut-être faut-il soi-même avoir eu besoin de l’autre pour mesurer toute la portée de ces gestes, en apparence si simples? Je ne pourrais me tenir devant vous aujourd’hui si je n’avais pas croisé sur ma route des personnes qui nous ont aidés, ma mère, ma sœur et moi, à nous enraciner en cette terre d’accueil. En retour, ma mère et moi-même avons été bénévoles. Et, aujourd’hui, terrassée par la maladie d’Alzheimer, ma mère bénéficie du soutien de plusieurs personnes, parmi lesquelles de nombreux bénévoles, qui ont toutes ma reconnaissance.

Une main que quelqu’un a tendue vers nous est une main que l’on tendra vers l’autre. C’est ainsi que la compassion se propage de coeur en coeur pour former une chaîne de solidarité qui transcende toutes les différences. C’est comme cela que l’espoir  parvient à se frayer un chemin parmi les souffrances et les misères du monde.

Des femmes, des hommes, jeunes et moins jeunes, ont l’audace de rêver grand et la détermination d’agir pour le bien collectif. Contre la violence, contre l’indifférence, contre l’exclusion. Pour le respect de l’autre, pour le dialogue, pour l’égalité des chances. La somme de leurs gestes contribuent la force de l’ensemble.

Nous avons parmi nous sept de ces personnes exceptionnelles, qui oeuvrent dans l’ombre à rendre notre société meilleure, plus juste et plus humaine. Vous rendre hommage aujourd’hui est pour moi un honneur et un privilège.

À Fay Bland, de Montréal, qui a à cœur d’accroître l’autonomie des enfants et des jeunes ayant des troubles de développement et des personnes handicapées, je dis merci.

À Nicole Desmarais, de Saint-Pie-de-Guire, qui fait de sa communauté un milieu de vie accueillant et stimulant pour les jeunes, je dis merci.

À Giuseppina Paola Di Paolo, de Montréal, qui  rallie les jeunes et les forces vives de l’École secondaire Lester B. Pearson pour poursuivre la lutte que Terry Fox a menée contre le cancer, je dis merci.

À Jacques Fournaise, de Sainte-Catherine, qui a épousé plus d’une cause et qui est un exemple de dévouement dans son lieu de travail et sa communauté, je dis merci.

À Marion et William Grandin, de Dollard-des-Ormeaux, qui ont multiplié les possibilités d’épanouissement pour un grand nombre d’enfants et de jeunes adultes ayant une déficience intellectuelle, je dis merci.

À Anthony et Lucy Shorgan, des piliers sur lesquels s’est érigé l’un des camps pour handicapés les plus reconnus en Amérique — le camp Papillon —, je dis merci.

À Arhondoula Vassiliadou-Augoustis, du quartier Parc Extension, à Montréal, qui a permis à de jeunes filles de familles défavorisées d’origine grecque d’exploiter leurs talents et de poursuivre leurs études secondaires, je dis merci.

Vous êtes cette lueur d’espoir qui empêche tant de gens de sombrer dans la solitude et le désarroi. Chacun et chacune à votre manière, vous avez touché des vies. Sans rien attendre en retour, vous avez donné aux autres une part de vous-mêmes et vous vous êtes enrichis d’une expérience nouvelle. Vous êtes des modèles de partage et d’ouverture, et inspirez vos semblables et la génération qui vous suit à marcher dans vos traces.

Au nom de la population canadienne, je vous remercie du fond du coeur de vous soucier de vos concitoyens, de vos communautés, de votre société, et de contribuer à notre mieux-être collectif.