Son Excellence la très honorable Michaëlle Jean - Discours à l’occasion d’une visite à l’école secondaire Children of the Earth

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Winnipeg, le jeudi 20 octobre 2005

Je suis tellement heureuse que vous soyez les premiers élèves que je rencontre à titre de gouverneure générale du Canada car l'aventure que vous vivez au sein de cette école est exemplaire. Mon mari, Jean-Daniel Lafond, un ancien professeur, est heureux aussi d'être ici. Lorsque nous avons entendu parler de vos succès, nous avons tenu à venir vous féliciter et à vous dire toute notre fierté. Je suis fière de vous.

Comme vous le savez, notre pays est né du métissage de plusieurs cultures, et celles des Autochtones remontent au fondement même de notre histoire collective. Nous devons l'affirmer dans le contexte d'une société ouverte et dans toutes les salles de classe de ce pays. Les efforts que vous déployez pour maintenir les traditions, les expériences et les langues autochtones sont un enrichissement pour l'ensemble de la population et un signe d'espoir pour celles et ceux qui, comme vous, travaillent fort pour préserver leur culture dans le monde entier. Vous êtes des modèles pour nous tous. Vous êtes des modèles pour le monde. Et cela devrait vous encourager à continuer.

Je suis la maman d'une petite fille âgée de six ans qui s'appelle Marie-Éden, et je tiens à ce qu'elle et tous les enfants de ce pays et du monde aient les moyens de s'épanouir. C'est pourquoi j'ai fait des jeunes ma plus grande priorité. Je crois sincèrement que l'avenir de notre pays et du monde repose entre vos mains, et qu'il faut bien vous préparer à prendre la relève. Vos idées, vos rêves, vos préoccupations m'intéressent au plus haut point.

Pour moi, il est essentiel de donner la parole à toutes les personnes de ce pays pour que l'on apprenne à se connaître davantage et à partager nos perspectives sur la vie telle que nous la vivons dans nos quartiers, dans nos villes, dans nos villages, dans nos familles et dans nos écoles. Chacune et chacun d'entre nous a la possibilité d'améliorer le monde autour de lui. Chacune et chacun d'entre nous a la responsabilité d'apporter sa propre contribution pour réaliser un grand rêve, celui d'un monde meilleur. Chaque geste en ce sens est d'une extrême importance. Il ne faut jamais être indifférent à l'autre. Il faut lutter ensemble contre l'indifférence si répandue de nos jours.

L'éducation que vous recevez ici, dans votre école, est une richesse inestimable. Souvenez-vous que plusieurs jeunes en ce monde en sont privés. Ma grand-mère disait toujours : « L'éducation, mes enfants, est la clé de la liberté. » Elle avait raison. C'est à l'école que l'on acquiert des connaissances, que l'on noue des amitiés qui durent parfois toute une vie, que l'on développe un esprit critique, que l'on apprend à assumer son rôle de citoyen et que l'on s'ouvre sur le monde. Tout cela mis ensemble est un apprentissage de la liberté.

Nous avons la chance d'habiter un pays qui nous permet de rêver grand et de participer pleinement à son évolution. Ce sont vous, les jeunes, qui allez assurer l'évolution de notre pays et qui serez bientôt notre voix dans le monde. Il faut y croire. Il faut en être convaincu chaque jour. Vous pouvez compter sur moi pour que vous soyez entendus partout où j'irai. Et je souhaite de tout cœur que votre voix porte loin.

J'aimerais vous raconter une aventure personnelle que j'ai vécue dans mon pays d'origine, Haïti, où j'étais retournée pour préparer un documentaire. Le hasard a voulu que je rencontre là-bas, dans le village où ma mère est née, un petit garçon, dont les parents étaient très pauvres, et qui faisaient plusieurs sacrifices pour que leur fils puisse aller à l'école. Ce petit garçon qui marchait plusieurs kilomètres tous les jours pour se rendre à l'école m'a confié à quel point il était reconnaissant de l'appui de ses parents qui lui permettaient d'obtenir une éducation pendant que ses frères et sœurs devaient travailler pour assurer la survie de sa famille. Il savait que grâce aux connaissances qu'il allait acquérir, il aurait un jour les moyens d'améliorer la vie des siens et de sa communauté. Il ne rêvait pas d'aller vivre ailleurs. Il voulait devenir professeur ou médecin. Soit nourrir les esprits ou guérir les corps.

L'histoire de ce petit Haïtien me touche beaucoup. Pas seulement parce qu'elle parle du courage d'un jeune et de sa famille qui l'aide à réaliser son rêve. Mais parce qu'elle me rappelle à quel point nous sommes, en ce pays, tellement chanceux d'accéder aussi facilement à l'éducation. Je veux que vous en profitiez pleinement. Et que vous sachiez de quel trésor vous disposez. L'éducation nous permet de mieux comprendre le monde qui nous entoure et d'enrichir la société à laquelle nous appartenons de notre propre expérience. C'est une promesse d'espoir, dont vous êtes toutes et tous ici les messagers. Je remercie chaleureusement vos directeurs et vos professeurs qui vous guident dans cette quête de connaissances.

Mais si je suis ici aujourd'hui, c'est surtout pour vous entendre parler. J'aimerais que vous me racontiez comment vous vivez cette aventure dans votre école, ce qu'elle a changé dans votre vie. Les difficultés auxquelles vous êtes confrontés. Et que vous me parliez de vos traditions que vous avez à cœur de préserver. Moi, j'aimerais parler de vous et de votre école partout où j'irai au Canada et dans le monde. Et j'ai besoin de votre aide pour qu'ensemble nous fassions reculer tous les préjugés qui naissent de l'incompréhension. Je veux que vous soyez des exemples pour tous les jeunes qui ont besoin d'espoir et qui ne demandent qu'à croire que tout est possible lorsqu'on y met du sien. Alors, à mon tour, je veux pouvoir compter sur vous.

Je vous remercie de m'accueillir dans votre école, et je vous encourage à continuer sur votre belle lancée. Maintenant, à vous la parole.