La nomination du duc de Devonshire comme gouverneur général causera des problèmes politiques pendant une brève période, le premier ministre britannique ayant omis de consulter le gouvernement du premier ministre Borden à ce sujet. Ce manquement à une pratique établie, allié au fait que le premier ministre Borden se soit senti insulté par cette indélicatesse entraînera, au début, des difficultés considérables.
Vers la fin de son mandat, le duc de Devonshire aura su éliminer les soupçons initiaux entourant sa nomination. Il fait preuve d'une grande dignité et d'une grande sagesse, particulièrement avec les nombreux Canadiens qu'il rencontre. Les premiers ministres Borden et Meighen ont tous deux fini par le considérer comme un ami personnel et un ami du Canada. C'est de lui que M. Borden parlera en soulignant « qu'aucun gouverneur général avant lui n'était ... plus capable de comprendre les grandes questions qui intéressent, non seulement notre pays et le Royaume-Uni, mais encore l'Empire tout entier. »
Durant le mandat du duc de Devonshire, le Canada connaît de grands remous sociaux. La Première Guerre mondiale est loin d'être terminée, et le Canada continue d'envoyer du matériel et des troupes. La victoire canadienne sur le Plateau de Vimy en 1917 vient confirmer la capacité de nos troupes au combat et nourrir la fierté et le nationalisme au pays. La duchesse de Devonshire oeuvre activement au sein d'organisations bénévoles pour aider à soulager la souffrance de ceux que la guerre affecte, et elle visite de nombreux hôpitaux militaires partout au pays.
La guerre cause également des problèmes sociaux. Le gouvernement canadien établit la conscription peu de temps après l'arrivée du duc de Devonshire. Cette décision aura notamment pour effet de diviser l'opinion entre les Canadiens-français et les Canadiens-anglais. Tout en faisant de son mieux pour encourager la réconciliation, le duc de Devonshire est très conscient de son rôle en tant que gouverneur général qui, à l'époque, demeure étroitement lié au gouvernement britannique. C'est pourquoi il veillera à consulter le premier ministre Borden et les chefs de l'opposition et à ne pas s'ingérer dans les questions d'ordre politique.
Durant cette période, le mouvement des suffragettes prend de l'ampleur, et c'est au cours du mandat du duc de Devonshire que les femmes obtiennent le droit de vote. L'agitation sociale prend également la forme d'une grève générale à Winnipeg, qui reflète les nouvelles exigences que les Canadiens ont à l'égard de leur société et de leur système politique. Le premier ministre Borden prend sa retraite vers la fin du mandat du duc de Devonshire et est remplacé par M. Meighen.
Même si le duc de Devonshire n'intervient pas dans la politique du pays, il s'intéresse manifestement aux Canadiens et à leurs vies, et il effectuera de nombreux voyages d'un bout à l'autre du pays. En 1918, il part pour Washington pour rendre visite, de façon non officielle, au président Woodrow Wilson à la Maison-Blanche. L'année suivante, il recevra le prince de Galles à Ottawa, lors de la première visite de celui-ci au Canada.
Ainsi, compte tenu de sa propre expérience de propriétaire terrien en Angleterre, il est extrêmement intéressé au développement de l'agriculture au Canada. Durant ses voyages, il discute d'agriculture avec des fermiers et autres intervenants de ce secteur industriel. Ces derniers considèrent qu'il possède les connaissances et l'expertise justifiant l'intérêt qu'il porte à ce domaine.
Il visite de nombreuses foires agricoles et horticoles et des expositions, et aime les parties de sucre dans la Gatineau. En 1921, le Trophée du duc de Devonshire pour la Ottawa Horticultural Society est établi. L'un de ses projets importants est d'encourager l'établissement de fermes expérimentales, dont la grande ferme expérimentale du gouvernement du Canada qui, à l'époque, se trouve en banlieue d'Ottawa. Ses discours font souvent allusion au potentiel du Canada à devenir le premier pays du monde dans le domaine de la recherche et du développement agricoles.
Le duc de Devonshire est en outre un mécène. Il visite souvent la Galerie nationale du Canada et encourage la tenue fréquente de spectacles à Rideau Hall. Les parties de patinage et de toboggan continuent d'agrémenter les hivers à la Résidence, ce qui permet à la duchesse de pratiquer de nouveau les techniques de patinage qu'elle avait apprises à Rideau Hall, lorsqu'elle était enfant. Le duc aime également le hockey et assiste à de nombreuses parties. Les Devonshire apportent beaucoup d'améliorations à Rideau Hall en faisant construire des courts de tennis et aménager les jardins. Et en 1918, la duchesse de Devonshire devient la première femme à planter un arbre commémoratif, un érable à sucre, dans le domaine de Rideau Hall. Ce que le duc apprécie le plus de tout ce qu'il aime du Canada, toutefois, ce sont les séjours qu'il fait à la Citadelle de Québec.
La vie avant et après Rideau Hall
Ayant commencé ses études à Eton, il poursuit son éducation au Trinity College à Cambridge avant de se lancer en politique, en 1891. Il épouse lady Evelyn Emily Mary Fitzmaurice, fille aînée de lord Lansdowne (cinquième gouverneur général du Canada), le 30 juillet 1892. De cette union naîtront deux fils et cinq filles. Deux des filles épouseront des aides de camp de leur père pendant son mandat comme gouverneur général : lady Maud Cavendish épousera le capitaine Angus MacKintosh en 1917, et lady Dorothy Cavendish épousera le capitaine Harold MacMillan, en 1920, qui deviendra plus tard premier ministre de la Grande-Bretagne. Le plus jeune fils, Charles Arthur Francis, épousera Adele Astaire, la soeur de Fred Astaire, en 1932.
En 1891, à la mort de son père qui représente le Derbyshire ouest, le duc de Devonshire lui succède sans opposition, devenant ainsi le plus jeune membre de la Chambre des Communes. Il conservera ce siège jusqu'en 1908. Il agira également comme trésorier auprès de la Maison de Sa Majesté de 1900 à 1903, puis comme secrétaire financier auprès du Trésor de 1903 à 1905. Il sera maire d'Eastbourne de 1909 à 1910, puis de Chesterfield de 1911 à 1912, et un « civil lord » de l'Amirauté britannique de 1915 à 1916. Il sera nommé gouverneur général du Canada en 1916.
De retour en Angleterre après son mandat au Canada, il travaille pour la Société des Nations avant de devenir secrétaire d'État aux Colonies, poste qu'il occupera jusqu'en 1924. Une fois retiré de la vie politique, il vivra dans son domaine du Derbyshire jusqu'à sa mort en 1938. Lady Evelyn s'éteint en 1960.