3 septembre 2008

par Son Excellence Michaëlle Jean

L’été a permis de recharger les batteries. Après un printemps 2008 intense en raison des activités organisées dans le cadre du 400e anniversaire de la fondation de Québec, incluant la visite officielle en France, de nombreuses rencontres, des forums, des discussions et toute une riche programmation que vous étiez en mesure de suivre sur ce site, il fallait du temps pour le repos et la réflexion.

Mais dès la mi-août, dans la vieille capitale en fête, j’ai eu le plaisir de présider à l’ouverture du Congrès mondial des bibliothèques et de l’information et à trois jours de rencontres plénières du Congrès mondial des jeunes. Voilà une façon de bien commencer la rentrée!

Parlons du Congrès mondial des jeunes.

Ils étaient plus de 500 jeunes issus de tous les coins du monde, auxquels se sont ajoutés de nombreux représentants d’organisations jeunesse du Québec et du reste du Canada. J’ai apprécié également la présence de nombreux représentants d’organisations multilatérales comme les Nations Unies et la Banque mondiale qui de plus en plus dirigent leurs actions vers la jeunesse en reconnaissant que les jeunes sont incontournables pour penser le développement humain. Les jeunes délégués ont rempli l’espace d’idées, d’initiatives, de propositions, de questions avec beaucoup d’assurance et de volonté d’agir. La collaboration avec l’Apathie c’est plate, RéGénération 2008, TakingITGlobal,  l’Institut du Nouveau Monde et D250 autour d’un Dialogue jeunesse international, nous a permis d’ouvrir la discussion par le Web et par les messageries textuelles à des jeunes connectés un peu partout, au pays comme à l’étranger, sur Internet. La responsabilité citoyenne, l’importance de l’esprit critique, le devoir d’agir localement et globalement, l’engagement social, passer de la parole aux actes, être entendus et être considérés comme faisant partie des solutions, voilà qui était au cœur des interventions et des préoccupations. Le tout dans un esprit festif avec la participation de nombreux artistes. L’art et la culture sont toujours de la partie, pour se rassembler, pour dire, partager et aussi pour passer à l’action.

Ce qui est remarquable, c’est de constater à quel point la jeunesse a cette capacité d’abolir les frontières et les différences, qu’elles soient linguistiques, sociales, géographiques, culturelles, religieuses, pour travailler et se reconnaître autour d’affinités, d’idées, de projets et de rêves à approfondir et à réaliser. Et cela, en faisant preuve d’un sens aigu du leadership et de la mise en commun. Les jeunes ont l’audace d’explorer des pistes qui sortent du conventionnel, qui peuvent surprendre, déranger, bousculer nos a priori mais dont l’impact et les résultats sont indéniables. Il faut savoir oser à leurs côtés.

Montréal Nord fournit l’occasion d’une réflexion en profondeur

Au moment même de ces rencontres se produisait l’explosion de violence dans le quartier de Montréal Nord. Un jeune abattu par la police lors d’une altercation, des résidents qui manifestent pacifiquement leur effroi et dans la soirée des commerces mis à sac, des voitures incendiées, l’émeute. Beaucoup de colère, d’incompréhension, de démesure et de désarroi. J’ai été très attristée et j’ai déploré publiquement la tournure des événements et la violence. D’autant plus que c’est un quartier que je connais bien pour y avoir vécu adolescente et où le milieu associatif est très enraciné et dynamique. Mais Montréal Nord fournit l’occasion d’une réflexion en profondeur sur les fossés qui se creusent, les affres de l’exclusion, la colère sourde de celles et ceux qui ont le sentiment de ne pas être considérés ni entendus. J’ai émis le souhait que les jeunes du quartier soient amenés à participer à cette réflexion et à exprimer leur point de vue sur ce qui doit changer et comment y arriver, comment construire le dialogue pour une plus grande harmonie sociale et des liens plus forts, plus durables.

Il y a pas de solutions possibles sans le concours de tous les citoyens et en particulier des jeunes.

Pour comprendre il faut entendre. Pour agir il faut inclure.