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Ottawa (Ontario) le vendredi 11 mai 2017
Le Canada : une nation de perdants.
C’est exact : de perdants!
Je parie que vous ne vous attendiez pas à une telle déclaration de la part du gouverneur général du Canada aujourd’hui?
Pourtant, c’était bel et bien ce que pensait Hugh MacLennan, cinq fois lauréat du Prix littéraire du Gouverneur général et l’un des plus grands romanciers canadiens du XXe siècle.
Pour lui, c’était un compliment, et non une insulte.
En nous traitant de perdants, il voulait dire que de nombreux Canadiens — à l’exception notable des Autochtones — sont venus au Canada par nécessité.
Ils fuyaient la guerre.
Ils fuyaient la faim.
Ils fuyaient l’oppression.
Ils fuyaient l’absence de possibilités.
Que venaient-ils chercher?
Le contraire de ce qu’ils fuyaient, sans doute :
Ils sont venus pour la paix.
La prospérité.
La tolérance.
Les possibilités.
C’est ce que le Canada représentait pour bon nombre de nos parents, grands-parents et ancêtres lointains qui sont venus ici.
Paix. Prospérité. Tolérance. Possibilités.
C’est plutôt attrayant, n’est-ce pas?
Ces quatre ingrédients sont essentiels, mais je crois que les deux derniers, soit la tolérance et les possibilités, constituent le fondement de la réussite du Canada, sa réussite passée, présente et future.
J’aimerais maintenant signaler également qu’il y a beaucoup d’invités de la communauté internationale qui assistent à cette conférence. En fait, je crois savoir que 34 pays et six continents sont représentés ici.
Bienvenue à vous tous! Comme vous le savez tous, la tolérance et les possibilités sont des éléments essentiels de notre succès à l’échelle mondiale. Nous sommes ravis de vous accueillir, et vos perspectives sont très appréciées. Le Canada souhaite être une nation qui cherche non seulement à s’ouvrir sur le monde pour apprendre et échanger, mais aussi à recevoir le monde chez lui.
Comme l’a écrit le poète et avocat canadien F.R. Scott :
Le monde est mon pays /
La race humaine est ma race.
Aujourd’hui, le monde est notre pays, la race humaine est notre race. Et sans tolérance ni possibilités — autrement dit, sans inclusivité —, il ne peut y avoir ni paix ni prospérité.
Vous tous ici présents le savez très bien. Après tout, les principaux thèmes de cette conférence sont l’appartenance, la réconciliation et l’inclusion. J’aimerais vous féliciter d’avoir choisi ces valeurs importantes.
Comme vous le savez, nous avons tous beaucoup de travail à accomplir.
Ici au Canada, nous sommes très choyés de faire partie d’une société qui accorde une grande importance à la diversité, mais le Canada demeure un projet toujours en évolution.
Nous ne sommes pas à l’abri du racisme, de la haine, de la violence, des inégalités, de l’exclusion et de l’aliénation. Nous ne pouvons donc pas nous permettre de relâcher nos efforts.
Votre travail est si important. Les Fondations communautaires du Canada trouvent leur raison d’être dans l’édification d’un meilleur pays sur la base de meilleures collectivités.
En fait, au moment où je suis devenu gouverneur général et où j’ai appelé tous les Canadiens à se joindre à moi dans l’édification d’un pays toujours plus averti et bienveillant, les Fondations communautaires ont largement dépassé les attentes dans leur réponse à cet appel.
Comment? En créant les Fonds de cœur et d’avenir pour aider des citoyens de partout au Canada à développer leurs talents et leurs collectivités et à connaître le succès à la mesure de leur plein potentiel.
Au début de cette initiative, soixante-douze pour cent des collectivités canadiennes avaient accès à une fondation communautaire.
Aujourd’hui, ce chiffre est passé à quatre-vingt-dix pour cent. Bravo! Il s’agit d’un succès remarquable digne d’être célébré.
Ce qui est encore plus stimulant, c’est que vous avez maintenant une stratégie en place pour atteindre les dix pour cent restants. Et vous collaborez avec les populations des collectivités nordiques pour refléter la culture, les valeurs et les aspirations du Nord. C’est un travail si important.
Tout au long de mon mandat, j’ai trouvé beaucoup de satisfaction à constater les résultats positifs de ces fonds dans les collectivités de l’ensemble du pays. Et j’ai rencontré tellement de personnes formidables qui ont rendu ces changements possibles. C’est très inspirant!
Tellement inspirant en fait que le bureau que je représente a établi un partenariat avec les Fondations communautaires du Canada pour créer la Fondation Rideau Hall, organisme caritatif indépendant et apolitique qui vise à accroître et à élargir le rayonnement du bureau.
La Fondation Rideau Hall a pour objectif de rassembler, d’orienter et de mobiliser les idées, les gens et les ressources en vue d’inspirer les Canadiens et de faire avancer le pays. Sa création à partir d’un bureau fondé sur la tradition constituait une nouvelle orientation, mais grâce en bonne partie à l’expertise et à l’enthousiasme de nos partenaires des fondations communautaires, nous sommes parvenus à créer quelque chose de distinctif et de puissant.
C’est exactement ce que les fondations communautaires font partout au Canada et dans le monde : travailler avec leurs partenaires pour créer quelque chose de distinctif et de puissant. Vous comprenez bien qu’une collectivité ou un pays est bien plus que la somme de ses parties et qu’avant tout, nous sommes plus forts lorsque nous travaillons tous ensemble.
Encore une fois, l’inclusivité est la clé. Elle se situe au cœur de tout ce que vous faites ici.
En passant, je crois aussi savoir que vous avez tous reçu un exemplaire du livre The Idea of Canada de la part des contributeurs et des amis des Fondations communautaires du Canada!
Ce que nous ne savez peut-être pas, c’est que les recettes de la vente de ce livre servent à financer le programme de la Médaille du souverain pour les bénévoles, que les Fondations communautaires appuient si activement.
Merci à tous.
J’aimerais maintenant parler un peu plus de cet esprit d’inclusivité au Canada, et de son importance pour notre avenir, à la fois ici au pays et dans le monde entier. En effet, même si le Canada n’est pas parfait, lorsqu’il a connu le succès par le passé, c’est parce qu’il s’est engagé à favoriser l’inclusivité, ainsi qu’à comprendre et à respecter la différence.
Je dirais même que notre succès découle de notre diversité, car elle nous renforce.
Et lorsque le Canada a connu l’échec par le passé — pensons à la politique désastreuse des pensionnats indiens —, c’est parce qu’il a tenté de réduire la diversité et de limiter l’inclusivité.
C’est une réalité que les Fondations communautaires comprennent parfaitement. La société canadienne est à son meilleur lorsqu’elle reflète sa géographie : vaste, immense et inclusive.
Permettez-moi d’ajouter ici que la beauté du Canada, et la chose vraiment novatrice, c’est que nous disposons d’un avantage lorsqu’il s’agit d’édifier une société inclusive.
Au Canada, plus que dans la plupart des régions du monde, nous pouvons incarner plusieurs de nos appartenances à la fois.
Un de mes prédécesseurs, John Buchan, l’a reconnu très tôt. Il avait la perspective d’une personne venant de l’extérieur. Il est né en Écosse et a été gouverneur général du Canada de 1935 à 1940, au début de la Seconde Guerre mondiale.
Malgré ces années difficiles, il s’est montré optimiste pour ce pays. Il a été parmi les premiers à énoncer un thème clé du Canada : celui de l’inclusivité.
Il a compris que nous sommes plus forts lorsque nous embrassons la diversité. Il y voyait la clé de la paix et la prospérité. C’est encore le cas.
En 1936, M. Buchan a dit ceci à un groupe d’Ukrainiens établis au Manitoba : « Le fait d’être de bons Ukrainiens fera de vous de meilleurs Canadiens. »
Pensez-y un instant.
Non seulement « vous pouvez être à la fois Canadiens et Ukrainiens », mais « vous serez de meilleurs Canadiens en respectant votre identité ukrainienne ».
Il en va de même pour toute combinaison d’origines à laquelle vous pouvez penser. Respectez qui vous êtes et d’où vous venez, et respectez où vous êtes et où nous irons ensemble.
Au Canada, vous pouvez faire les deux.
Pensez à la façon dont cette notion de respect et de promotion de la diversité est devenue une réalité incontournable qui est parfaitement adaptée au monde dans lequel nous vivons aujourd’hui.
Notre monde est complexe, diversifié et mondialisé, et il évolue très rapidement. La quatrième révolution industrielle — tout juste après la révolution du numérique — porte sur les nouvelles technologies. Nous sommes pratiquement dans la science-fiction.
À vrai dire, les auteurs de science-fiction ont bien du mal à écrire de nouveaux scénarios de nos jours, car la fiction est maintenant devenue réalité scientifique!
Internet des objets. Intelligence artificielle. Robotique. Impression 3D. Biotechnologie. Voitures autonomes. Nanotechnologie.
Tout comme les première, deuxième et troisième révolutions industrielles, la quatrième révolution a de profondes répercussions sur nos vies. C’est le propre des révolutions.
Dans une telle conjoncture, nous devons nous adapter et modifier notre pensée, notre comportement, nos lois et nos institutions, tout comme notre façon d’apprendre et de suivre le rythme. Nous devons accepter que le changement fait partie de la réalité, que nous le voulions ou non.
La seule question à se poser est la suivante : dans quelle mesure guidons-nous ce changement? Autrement dit, comment faire pour éviter d’en être les victimes?
L’auteur Thomas Friedman, récipiendaire d’un prix Pulitzer, parle de « l’ère de l’accélération », une époque où les gens et les sociétés sont mis à l’épreuve par la circulation rapide des idées et la transformation de presque toutes les sphères de la vie.
Notre façon de réagir, écrit-il, sera le facteur déterminant de notre succès pour ce qui est de bien vivre ce moment historique.
Je cite :
[traduction] « Les sociétés qui sont les plus ouvertes aux flux du commerce, de l’information, de la finance, de la culture ou des savoirs, et celles qui désirent le plus en tirer des enseignements et y contribuer, sont celles qui ont le plus de chances de se bien se développer dans l’ère de l’accélération. Celles qui en seront incapables vivront des situations difficiles. »
Que peut-on faire pour contribuer à façonner ce changement plutôt que de simplement y réagir? Voilà notre défi.
Une chose est sûre : en tant que pays doté d’un vaste territoire, mais d’une population relativement petite, nous devrons puiser dans les talents de tous les Canadiens. Et cela signifie que nous devons absolument bâtir des collectivités fortes.
Il en va de même pour les collectivités du monde entier.
C’est là votre défi en tant que philanthropes et organisateurs au sein de vos collectivités. Les collectivités sont en mutation, les façons de donner se transforment, et votre tâche consiste à mettre ces changements au service du bien.
Je sais que vous êtes à la hauteur de la tâche.
J’aimerais donc vous lancer un défi :
Ne gaspillons pas ce moment.
Parlez-vous.
Soyez toujours ouverts aux nouvelles idées.
Soyez curieux.
Prenez des risques.
Invitez d’autres personnes à se joindre à la conversation.
Bon nombre d’entre vous sont les figures de proue de votre génération. Vous venez de partout au pays et du monde entier. Vous êtes les ambassadeurs de vos villes et de vos régions, et je sais que vous passerez à la prochaine étape.
Je sais que vous serez les ambassadeurs de la tolérance, de l’ouverture, de la collaboration et d’un monde inclusif.
Nous devons défendre le genre de collectivités, et le genre de pays et de monde, dans lequel nous voulons vivre.
Nous devons l’exposer clairement. Les mots sont importants.
Nous devons le bâtir. Les actions sont importantes.
Nous devons le vivre. La conviction est importante.
Nous devons le partager. L’inclusivité est importante.
Les collectivités sont importantes.
Corrigeons les erreurs du passé et bâtissons un pays et un monde plus inclusifs.
Encourageons nos partenaires à travailler de concert avec nous et à apprendre ensemble.
C’est maintenant à vous d’agir et l’avenir est entre vos mains!
Merci, comme toujours, d’avoir répondu à l’appel.