Discours prononcé devant l’Empire Club of Canada – Qu’allons-nous offrir au Canada en 2017?

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Toronto (Ontario), vendredi 19 juin 2015

 

Où étiez-vous en 1967?

J’aperçois quelques visages juvéniles dans l’auditoire. Vous êtes trop jeunes pour vous souvenir de cette année particulière.

Je vois également certaines personnes aux cheveux gris, comme moi. La plupart d’entre vous se souviennent certainement de 1967.

Pour ma part, je m’en souviens parfaitement.

Au cours de l’année du centenaire du Canada, j’étais professeur de droit à l’Université Queen’s, à Kingston.

J’étais un novice à l’époque, puisque j’en étais à ma deuxième année d’enseignement.

J’étais aussi débutant dans mon rôle d’époux. Sharon et moi étions mariés depuis trois ans seulement, et nous préparions l’arrivée de notre premier enfant.

Comme beaucoup de Canadiens à l’époque, je commençais ma carrière professionnelle et ma vie familiale.

Cette nouvelle génération d’hommes et de femmes partageait certaines qualités importantes.

Nous étions sûrs de nous, avant-gardistes et ambitieux, et nous exprimions ces qualités de diverses façons pendant cette année du centenaire.

J’ai en mémoire des images très nettes de cette période.

Les Canadiens ont construit des centaines de patinoires, d’écoles, de bibliothèques et de centres communautaires dans lesquels de jeunes athlètes, des étudiants et des familles pouvaient jouer, apprendre et grandir ensemble.

Et qui ayant vécu à cette époque ne se souvient pas d’Expo 67?

Plus qu’une célébration du Canada, ce fut notre cadeau au monde entier.

Pourquoi avons-nous célébré? Pourquoi avons-nous donné de façon si manifeste et généreuse?

Ce centenaire donnait à l’ensemble du pays une occasion sans précédent de réfléchir, de se remettre en question et d’imaginer son avenir – un avenir qui serait témoin de nos progrès constants vers l’équité, l’égalité et la justice.

Ce regard porté sur cent années de vie commune nous a permis de regarder vers l’avant et de consacrer toute notre attention et notre énergie à créer ce genre de société canadienne.

Bien des choses ont changé depuis notre centenaire.

Pour notre part, Sharon et moi sommes mariés depuis plus de 50 ans. Nous avons cinq enfants et 12 petits-enfants.

Notre pays a également beaucoup changé.

Il est beaucoup plus diversifié maintenant – ce qui nous oblige encore davantage à tolérer nos différences et à garder une vision inclusive.

Notre pays est plus urbain que jamais. Nous sommes en proie aux difficultés qui existent lorsqu’on vit, travaille et circule dans des villes en pleine expansion.

Notre monde a bien changé lui aussi.

Nous vivons à une époque extraordinaire, un moment crucial de l’histoire.

Une époque de mondialisation profonde.

De changements technologiques perturbateurs.

De changements démographiques importants.

De graves préoccupations liées à notre environnement naturel.

D’attitudes et d’attentes changeantes à l’égard des gouvernements et des services publics.

Considérant tous ces défis qui nous confrontent ici-même et à l’extérieur de nos frontières, je vous pose une question aujourd’hui : qu’allons-nous offrir au Canada pour son 150e anniversaire en 2017? De façon plus large, que faisons-nous pour faire du Canada une nation véritablement avertie et bienveillante?

Une occasion aussi importante que le 150e anniversaire du Canada n’arrive qu’une fois, peut-être deux, dans une vie. Comment allez-vous utiliser cette occasion rare pour faire quelque chose d’exceptionnel pour votre pays, pour offrir un présent au Canada?

Depuis cinq ans, à titre de gouverneur général, je parcours le pays et rencontre des Canadiens de tous âges, de toutes régions et de toutes origines. Et je leur demande de bien réfléchir à ce qu’ils offriront au Canada.

Dans un an et demi, nous serons en 2017. Le 150e anniversaire du Canada approche à grands pas.

Le temps est venu de mettre nos plans à exécution; de concrétiser nos idées; de passer à l’action.

Parce que le pays dont nous rêvons ne va pas se créer tout seul. Des volontés fortes et des actions novatrices s’imposent.

Qu’est-ce que j’entends par « novatrices »? C’est un terme qu’on entend souvent à tout propos, si souvent même qu’il semble avoir perdu sa réelle signification.

Innover ne veut pas dire inventer. L’innovation est un processus, un moyen, qui nous permet d’améliorer la productivité et, surtout, de donner aux gens de meilleures façons de s’organiser, de fonctionner et de vivre. De telles améliorations et adaptations sont essentielles si l’on veut maintenir et augmenter notre niveau de vie au Canada.

Nous innovons dans les domaines de la science, du génie, de la médecine et de l’éducation. De la même façon, nous devons innover dans notre façon de donner.

Nous devons donner pour atteindre les personnes marginalisées et répondre aux besoins collectifs laissés en plan.

Nous devons donner pour faire en sorte que chaque Canadien puisse atteindre son plein potentiel et donner sens et dignité à sa vie.

Nous devons donner grâce à des méthodes de plus en plus efficaces et ambitieuses afin de surmonter les défis redoutables qui caractérisent notre société actuelle.

À quoi ressemble un don novateur? En voici un exemple. Au début du mois, j’étais à Toronto, plus précisément au Centre d’investissement d’impact MaRS. Les membres du Groupe de travail sur l’investissement social du G7 étaient également présents, réunis au Canada pour la première fois.

Ces hommes et ces femmes travaillaient ensemble afin de mieux comprendre comment mettre les capitaux du secteur privé au service de l’intérêt public, tout en générant des rendements financiers pour les investisseurs. Ce genre d’investissement tient compte du fait que le Canada, tout comme ses partenaires du G7, fait face à des défis considérables dans les domaines social, environnemental et financier.

La portée et la gravité de ces défis exigent que nous soyons novateurs parce que, parfois, les gouvernements n’ont pas la capacité ou la souplesse voulue pour réagir de manière appropriée. Ce n’est pas que le monde manque d’argent pour surmonter ces défis, mais plutôt que l’argent est immobilisé dans les marchés financiers, investi dans des placements productifs d’intérêts plutôt que mis à contribution là où il est le plus nécessaire.

Lorsque nous investissons des capitaux afin d’aider les gens, les collectivités et les pays à surmonter leurs défis — tout en générant des revenus pour les investisseurs — nos dons sont novateurs.

Il ne s’agit que d’un exemple de la façon dont nous pouvons libérer nos avoirs pour le bien commun. Au cours de l’année et demie qui va suivre, notre tâche sera de découvrir et de mettre à exécution d’autres exemples de dons novateurs.

Je suis convaincu que nous en sommes capables.

J’aimerais mettre l’accent sur l’importance de donner de manière intelligente et compatissante. Donner de manière intelligente signifie faire preuve d’innovation et mesurer régulièrement notre impact. Les deux sont importants.

La finance sociale est un bon exemple de cela, ne serait-ce que parce qu’elle est axée sur la mesure de l’impact. La mesure permet de rendre compte du progrès, d’améliorer le rendement et de communiquer la valeur. Elle permet aussi d’éviter la duplication inutile des efforts et des coûts administratifs.

Donc, si vous voulez appuyer une bonne cause, la première chose est de trouver un organisme caritatif qui a le même objectif. S’il n’y en a pas, la deuxième chose est de voir si vous pourriez aider un organisme existant à se donner cet objectif. Si c’est toujours impossible, la troisième chose sera de combler ce vide.

Vu les contraintes de temps et de ressources, il est important de donner intelligemment.

Nous voulons créer des partenariats et trouver des synergies pour amplifier nos dons et les rendre plus efficaces.

Nous voulons bâtir sur ce que les Canadiens font déjà bien.

Nous voulons faire preuve d’une bienveillance avertie — ce qui signifie innover et mesurer l’impact.

Notre pays possède une longue et riche histoire dans le domaine de l’innovation — technologique, économique et politique.

En fait, le Canada lui-même a été qualifié d’innovation en matière de diversité et de multiculturalisme — une expérience visant à vérifier la proposition selon laquelle les peuples du monde entier peuvent vivre ensemble en harmonie.

Nous devons mettre notre talent pour l’innovation au service de notre générosité.

Parce que l’innovation et la générosité sont des processus fondamentalement humains, nous devons encourager une culture axée sur la générosité à l’échelle communautaire.

L’entraide se fait au niveau local et les initiatives communautaires sont très importantes. L’initiative Mes beaux moments, la campagne sur les médias sociaux que nous avons inspirée à Rideau Hall, met en lumière des milliers de ces gestes bienveillants posés par des personnes ou des quartiers. La campagne vise à faire résonner ces gestes, à bâtir sur l’excellent travail effectué par ces gens et ces organismes caritatifs et à les amplifier.

Il y a des récits de Canadiens qui font des dons à des organisations caritatives, qui travaillent en tant que bénévoles dans des refuges pour animaux, qui entretiennent des jardins communautaires, qui offrent leurs compétences professionnelles aux personnes dans le besoin.

Pour marquer l’année de son quarantième anniversaire, Alyson Fair s’est engagée à réaliser 40 actes de bienveillance. Elle a non seulement respecté sa promesse, mais ces moments de générosité l’ont incitée à continuer sur cette lancée. C’est un sentiment extraordinaire, déclare-t-elle, de voir quelqu’un vous sourire et vous dire, « Merci, vous avez ensoleillé ma journée ».

Ces gestes simples, mais précieux, peuvent nous inspirer à faire du 150e anniversaire de la nation un moment qui passera dans les annales. Soyons à la hauteur!   

C’est le défi que je lance aux centaines de Canadiens qui sont présents ici aujourd’hui et aux millions d’autres qui ne le sont pas.

Il y a quelques années, le maire de Calgary, Naheed Nenshi, a mis ses concitoyens de Calgary au défi de faire trois choses pour leur ville. Je suis heureux de reprendre cette belle idée et de lancer aux membres de l’Empire Club, aux invités et aux dirigeants le défi d’offrir trois présents vraiment spéciaux au Canada en 2017.

Ils peuvent être grands. Ils peuvent être modestes. Mais ils doivent être spéciaux.

Mettez à profit vos connaissances, vos aptitudes, vos expériences.

Mettez à profit votre ambition, votre motivation et votre intelligence.

Mettez à profit vos contacts personnels et professionnels pour offrir trois moments de générosité en 2017.

Faites preuve d’intelligence.

De créativité.

De bienveillance.

D’innovation.

Et trouvez le moyen d’en faire part au pays. Parlez-nous de vos beaux moments et de ce qui vous a poussé à les offrir. Ne le faites pas dans un esprit d’arrogance, mais avec assurance, optimisme et altruisme.

Lord Byng de Vimy, le douzième gouverneur général de notre pays, a demandé un jour aux Canadiens d’avoir l’esprit et l’âme aussi vastes que ce pays qui leur est cher. Je reprends à mon compte ces mots évocateurs et l’énergie ambitieuse qui les anime.

Alors que nous nous préparons en vue du 150e anniversaire du Canada en 2017, je vous demande de tirer parti de cette occasion mémorable et de trouver des moyens intelligents de donner. N’oubliez pas qu’il faut faire preuve d’innovation et mesurer l’impact. Trouvez trois présents spéciaux qui feront de nous une nation meilleure pour la génération d’aujourd’hui et les générations de demain.

Avec des esprits et des âmes aussi vastes que ce pays que nous aimons, faisons de ces présents spéciaux le grand projet de célébration du 150e anniversaire du Canada.

Merci.