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Ottawa (Ontario), le mardi 10 février 2015
Je vous remercie de m’avoir invité à prononcer quelques mots à l’occasion de cette assemblée importante.
Je crois comprendre que vos discussions de ce soir porteront sur l’identification des priorités visant le développement et l’adoption de technologies manufacturières de pointe.
Et votre objectif global? Faire du Canada un centre d’excellence international en matière de technologie manufacturière.
Je suis heureux de voir un programme aussi ambitieux! Il me fait penser à ce que mon prédécesseur, M. John Buchan, a dit lors de sa nomination au poste de gouverneur général en 1935 :
Il avait dit : « Quelle grosse besogne que le Canada. »
On peut dire la même chose de vos responsabilités en tant que chefs de file dans les domaines de la fabrication et de la recherche. Nous vivons à une époque complexe – transformatrice – où les produits, les processus, les modèles de gestion et les chaînes d’approvisionnement du secteur manufacturier sont profondément touchés par les nouvelles technologies.
Permettez-moi de nommer quelques-unes des tendances qui ont des répercussions sur le secteur :
- La numérisation et l’intégration de capteurs, de systèmes de visualisation et de robotique – aussi connues sous le nom de mécatronique;
- L’impression 3D;
- Les produits et chaînes de production interconnectés – communément appelés l’Internet des objets;
- Les mégadonnées et l’intelligence artificielle;
- Le matériel informatique et les logiciels évolués pour la visualisation, l’établissement de modèles, la conception et la simulation.
Comme je le disais, demeurer à jour, pertinent et concurrentiel est « une grosse besogne » pour les manufacturiers autant que pour les chercheurs : voilà pourquoi je suis si heureux de tous vous voir réunis dans une même salle.
En gardant en tête notre contexte actuel, je souhaite brièvement soumettre cinq questions dans le but de « mettre la table » en vue de vos discussions de ce soir et des jours à venir.
Ayant passé une bonne partie de ma carrière, avant de devenir gouverneur général, dans des universités fortement axées sur la recherche, je dirais que la première question à poser est la suivante : comment pouvons-nous améliorer la connexion entre la recherche et l’industrie? Il s’agit là d’une question particulièrement importante si l’on veut aider les petites et moyennes entreprises manufacturières à adopter et à gérer les nouvelles technologies. N’oubliez pas, la recherche transforme l’argent en idées et le développement transforme les idées en argent.
Voici la deuxième question que je poserais : comment pouvons-nous nous assurer que les jeunes sont informés des possibilités offertes par les secteurs de la technologie et de la fabrication de pointe? Encore une fois, mon expérience dans le milieu de l’enseignement postsecondaire m’a convaincu de l’abondance de talent et d’énergie chez les jeunes de ce pays. Nous pouvons et nous devons encourager ce talent, et l’un des éléments clés est l’apprentissage par l’expérience.
Troisièmement, comment devons-nous nous y prendre pour réduire les risques associés à l’adoption des nouvelles technologies? L’échec, on le sait bien, est une étape nécessaire qui mène au progrès, mais cette question est particulièrement importante dans le cas des petites entreprises qui ne disposent peut-être pas des ressources nécessaires pour se prêter à des expérimentations prolongées. Des réseaux de collaboration contribuent à atténuer ces risques et à les partager.
Quatrièmement, comment pouvons-nous améliorer les liens entre les manufacturiers et les entreprises spécialisées en technologie afin de garantir un secteur manufacturier de pointe? Il suffit parfois de se tenir informés des nouvelles technologies qui sont à notre portée.
Et pour conclure, comment pouvons-nous éviter l’autosatisfaction et promouvoir une attitude axée sur la réussite et l’excellence? Pouvons-nous contribuer à inculquer un entendement plus prononcé du besoin d’innovation et une plus grande soif de l’excellence?
Ma réponse à cette dernière question est : « Oui, nous le pouvons et nous nous devons de le faire. »
Permettez-moi de conclure avec un récit intemporel pertinent qui peut donner matière à réflexion.
Chacun sait qu’en Europe, au XVIe siècle, l’invention de la presse à imprimer a changé le cours de l’histoire de la civilisation.
Ce qui est peut-être moins connu, par contre, est la mesure dans laquelle la presse à imprimer est née d’une collaboration étroite. En effet, la presse à imprimer n’aurait jamais vu le jour s’il n’avait été d’un groupe d’innovateurs qui ont joint leurs efforts pour concrétiser leur vision.
Ces innovateurs étaient Johannes Gutenberg, Martin Luther, et Frédéric, l’Électeur de Saxe – je les appellerai John, Martin et Fred.
John a inventé la presse à imprimer – la technologie – vers 1450, et a rapidement fait faillite. Il a fallu les écrits de Martin, qui a traduit la bible – le contenu, si vous voulez – trois quarts de siècle plus tard, et l’appui de Fred, qui est intervenu en faveur de Martin auprès de Rome, pour que l’attention de l’Europe occidentale se tourne véritablement vers la presse à imprimer.
Fait intéressant à noter : l’âge de la presse à imprimer est arrivé sur le tard en Europe. En effet, dès le IIIe siècle, les Coréens disposaient de caractères d’imprimerie mobiles, et Marco Polo avait vu, en 1215, des livres imprimés en Chine. Mais ces civilisations n’avaient que John. Il leur manquait l’apport d’un Martin et d’un Fred. Ce qu’il faut retenir, c’est que la contribution de ces trois hommes a été nécessaire pour faire connaître la presse à imprimer, qui est à la source de la tradition d’apprentissage par la lecture, la pensée critique et la discussion, et de la transformation du rôle de l’individu au sein de la société.
Pourquoi, me direz-vous, vous ai-je raconté cette histoire?
Simplement pour souligner que l’innovation nous oblige tous à travailler ensemble. Il a fallu un John, un Martin et un Fred pour mettre au monde la presse à imprimer. Les manufacturiers et exportateurs canadiens ont besoin de technologies de pointe pour réussir, et la recherche de pointe peut être renforcée par un secteur manufacturier sain et dynamique.
Dans cette optique, je vous souhaite beaucoup de succès dans la poursuite de ce travail important.
Merci.