Ce contenu est archivé.
13 avril 2010
par Son Excellence Michaëlle Jean
Lorsqu’en 2006 j’ai entrepris en visite d’État un premier périple dans cinq pays africains, en Algérie, au Mali, au Ghana, en Afrique du Sud, puis au Maroc, je l’ai intitulé et mené comme une tournée de l’espoir. Il m’importait, d’un pays à l’autre, de mesurer les forces, de réaliser la vigueur de la société civile et d’identifier les solutions africaines aux défis de ce continent. Lorsque j’y suis retournée une seconde fois, à l’invitation de la première femme présidente d’un État africain, Ellen Johnson Sirleaf, au colloque international qu’elle a organisé dans son pays, le Liberia, sur le renforcement des capacités des femmes, le développement du leadership, la paix et la sécurité internationales, j’ai pu de nouveau ajouter la voix du Canada à cette riche réflexion et en appui aux actions menées par des centaines d’organisations africaines.
Je suis impatiente de renouer avec les femmes, les hommes, les jeunes du continent africain, berceau de l’humanité, mais si cruellement malmené par l’histoire. J’y serai alors que de nombreux pays y célèbrent le cinquantième anniversaire de leur indépendance après des décennies de colonisation. L’autonomie politique, la reconquête identitaire et culturelle réalisées, l’Afrique est aujourd’hui pressée de mener à bien une nouvelle révolution à la fois sociale, économique et démocratique. Révolution sociale : car le rêve est de voir les populations émerger des misères quotidiennes, de la pauvreté endémique, des épidémies, de l’analphabétisme, de l’insécurité et des conflits. Révolution économique : pour une économie au service du bien commun, du développement humain et durable avec priorité donnée à l’éducation et à la formation; une économie plus juste qui mettrait fin à l’exploitation abusive des ressources et de la main d’œuvre et attirerait davantage des investissements responsables; une économie qui favoriserait toutes les formes de coopération susceptibles d’aider les pays africains à déboucher sur le marché mondial de façon plus compétitive. Révolution démocratique : dans l’esprit de la bonne gouvernance — inclusive, transparente, responsable — et de l’état de droit qui garantit justice et sécurité pour toutes et pour tous ainsi que l’alternance politique.
Quatre pays africains du 14 au 24 avril.
Accompagnée d’une délégation représentative de la société civile canadienne, je serai d’abord reçue au Sénégal par le président Abdoulaye Wade et plusieurs autres représentants d’institutions nationales sénégalaises avec qui j’aurai des discussions bilatérales. Soucieuse de mener une diplomatie de proximité et de multiplier les points de vue, j’irai aussi à la rencontre d’étudiants de l’Université Cheikh Anta Diop, d’organisations de femmes qui bénéficient de fonds canadiens pour le microcrédit et finalement d’artistes lors d’un forum Point des Arts dans ce pays où la culture est phare.
Je quitterai Dakar pour Kinshasa, en République démocratique du Congo (RDC), à l’invitation du président Joseph Kabila Kabange, et j’aurai l’insigne honneur de prendre la parole au Palais du Peuple devant les membres de l’Assemblée nationale et du Sénat. Je mettrai beaucoup l’accent sur la situation des femmes congolaises, sur leurs besoins en matière de santé et de sécurité. J’aurai l’occasion de rencontrer nombre d’organisations féminines à Kinshasa au centre de santé N’Galiema, qui forme des infirmières accoucheuses spécialisées aussi dans les soins postnataux car le taux de mortalité des mères lors de l’accouchement et des nouveau-nés est dramatiquement élevé. Puis à Goma, je me rendrai au centre HEAL (Health-Education-Action-Leadership) Africa, qui vient en aide aux femmes et aux filles victimes de violences sexuelles, un terrible fléau dans cette région. Ces projets sont depuis des années soutenus par des organismes canadiens. En tant que commandante en chef, je rencontrerai des membres de la Mission de l’Organisation des Nations Unies en RD Congo (MONUC) à laquelle le Canada participe pour discuter des attaques meurtrières qui sont dévastatrices pour les communautés des Grands Lacs.
Dans le pays voisin de la RDC, au Rwanda, j’arriverai en plein mois de deuil et de souvenir du génocide de 1994 qui a fait plus de 800 000 morts. Je serai alors amenée à rendre hommage aux victimes et à visiter des sites commémoratifs, celui de Gisozi et de Butare. Mémoire et réconciliation pour mieux vivre ensemble et construire la paix seront au cœur des discussions à l’occasion de toutes mes rencontres aussi bien bilatérales qu’avec les ONG et la population. Le président de la République du Rwanda Paul Kagame tient à me montrer où en est son pays aujourd’hui, comment il renaît du pire. Le Rwanda est chef de file mondial en matière d’équité hommes-femmes, 50 % des parlementaires sont des femmes et elles occupent des secteurs clé au sein du gouvernement. Or, il va sans dire, que l’avenir de l’Afrique passe par les femmes.
Sur le chemin du retour au Canada, du Rwanda nous nous arrêterons au Cap Vert. Le président capverdien Pedro Verona Rodrigues Pires a, tout comme ses compatriotes, à cœur de renforcer et créer de nouveaux liens de coopération économique et culturelle avec le Canada. À Sal, j’aurai l’occasion de rencontrer des décideurs et des représentants d’organisations, comme l’ONG Valorizar Sal, qui œuvrent pour la solidarité, l’éducation et le civisme.
Les délégués canadiens livreront ici chaque jour le bilan de nos rencontres et leurs impressions durant cette nouvelle « tournée de l’espoir », je vous invite à dialoguer avec nous au moyen de toutes les plateformes des nouveaux médias.