Remise du Prix Michener et des bourses Michener-Deacon

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Rideau Hall, le jeudi 18 juin 2015

 

Sharon et moi nous réjouissons de la présence de Mme Diana Michener Schatz et de son époux, M. Ray Schatz.

Ce prix qui reconnaît l’excellence en journalisme d’intérêt public a été inauguré il y a 45 ans par le père de Diane, M. Roland Michener.

Nous sommes très heureux de vous savoir des nôtres.

En temps normal, ce sont les journalistes qui posent les questions. Aujourd’hui, cependant, c’est moi qui vous en poserai une :

Pourquoi faites-vous ce que vous faites?

Je ne parle pas de ce que vous faites, à savoir mener des recherches, écrire et diffuser des nouvelles importantes dans l’intérêt du public.

Je ne parle pas non plus de la façon dont vous le faites — en cultivant vos sources, en posant des questions difficiles et en cherchant inlassablement des faits.

Je parle de la raison pour laquelle vous le faites.

Voici des réponses possibles :

pour révéler la vérité;

pour faire la lumière sur des histoires inédites importantes;

pour donner une voix à ceux qui n’en ont pas;

pour forcer les plus puissants à rendre des comptes.

Mais ces réponses ne racontent pas toute l’histoire. Elles ne vont pas au fond des choses.

Vous faites ce que vous faites parce que vous croyez en l’espoir.

On accuse souvent les journalistes d’être durs et cyniques. Toutefois, les meilleurs journalistes — comme vous — sont les moins cyniques parmi nous.

Vous croyez qu’il y a le bien et le mal.

Vous croyez que les gens sont capables des pires choses, mais des meilleures également.

Vous croyez en notre pays et en notre capacité à créer une société juste et équitable.

Voilà pourquoi vous faites ce que vous faites. Parce que vous croyez et que vous avez espoir.

Voilà pourquoi vous endurez les longues heures de travail, les appels non retournés, les demi-vérités et les fréquentes manipulations.

C’est un gagne-pain, oui, mais vous auriez pu en choisir un autre.

Vous faites votre travail dans l’intérêt commun.

Quand nous lisons, écoutons ou regardons vos histoires, ce n’est pas nécessairement pour connaître l’état de nos forces militaires, de notre marché du travail, de notre système de santé, de notre démocratie, du traitement que nous offrons aux victimes ou de nos foyers d’accueil — les histoires et les thèmes pour lesquels vous avez été mis en nomination.

Au bout du compte, ce n’est pas tant les sujets que vous couvrez qui nous captivent, mais les raisons pour lesquelles vous les couvrez.

Nous vous suivons parce que, nous aussi, nous croyons au bien commun et à la promesse du Canada.

Nous aussi, nous avons espoir et nous souhaitons que notre pays atteigne son plein potentiel.

Nous aussi, nous voulons bâtir un Canada plus averti et bienveillant, pour nos enfants et nos petits-enfants.

Parfois, cela signifie faire face à la dure réalité et révéler des histoires déplaisantes.

En d’autres mots, des mauvaises nouvelles!

Une nation, voire une civilisation, qui perd le courage ou l’appétit nécessaire pour faire face aux informations troublantes et changer le statu quo devient incapable d’apporter les changements nécessaires.

Elle finit par se perdre et échouer.

Cela me fait penser à Hugh MacLennan, qui compare les civilisations aux jardins dans son dernier roman, Voices in Time.

Il écrit ceci :

« Dans les périodes du passé somme toute rares que nous qualifions de civilisées, les gens comprenaient qu’une civilisation est comme un jardin que l’on cultive dans la jungle. À l’instar des fleurs et des légumes qui poussent à partir de graines cultivées, les civilisations s’épanouissent grâce à des idées et des perceptions soigneusement étudiées et adéquatement examinées. Dans la nature, en l’absence d’un jardinier, les mauvaises herbes envahissent le jardin et le détruisent, car elles n’ont pas besoin d’être cultivées. » [traduction libre]

Les meilleurs journalistes sont comme des jardiniers : ils nous aident à éliminer les mauvaises herbes pour permettre aux nouvelles plantes de grandir.

Une chose est sûre, vous savez creuser!

Malgré les nombreux changements survenus récemment dans l’industrie des nouvelles, les principes de base du bon journalisme n’ont pas changé.

Et ils ne changeront pas. L’éthique professionnelle et l’intégrité des journalistes seront toujours à la mode.

Je remercie et félicite chacun de vous, les journalistes, rédacteurs en chef, enseignants et étudiants, pour votre dévouement à l’égard de ces principes et du Canada.

Chacun de vous, ainsi que les organisations que vous représentez, est un candidat et un récipiendaire digne du Prix Michener et de la bourse Michener-Deacon.

Je vous souhaite le plus grand des succès.